C’est un enjeu des prochaines élections présidentielles : le service de l’eau potable peut-il rester un service marchand livré aux multinationales de l’eau, en position dominante dans notre pays ?
Depuis une quinzaine d’années un puissant mouvement citoyen a obtenu le retour à des régies publiques de l’eau dans notre pays. Parti de Grenoble puis Paris, ce mouvement a conduit des municipalités à reprendre le contrôle du service public de l’eau. C’est le cas de Montpellier et de sa Métropole suite aux élections municipales de 2014. J’ai eu l’honneur de conduire ce retour en régie publique de l’eau. Voici en cliquant ici les interventions qui en résument l’essentiel de l’historique. Dans mon intervention au dernier conseil Métropolitain j’ai présenté la délibération de la mise en place d’un Observatoire de l’eau qui parachève le mode démocratique de gouvernance citoyenne de la politique de l’eau.
Mais il faut aller plus loin. Aujourd’hui les régies publiques municipales couvrent 10 millions d’habitants, laissant ainsi 56 millions livrés à l’appétit mercantile des multinationales de l’eau. Partout où les citoyens sont consultés par référendum ou par d’autres moyens, c’est à une écrasante majorité qu’ils se prononcent pour le retour en régie publique. Là où les élus entendent perpétuer les concessions au privé, ils se gardent de consulter leur population. Il n’est pas acceptable que la fourniture de ce bien commun primordial, base de toute vie humaine, soit géré de manière aussi peu démocratique et inégale selon les territoires. D’autant que le changement climatique, les dégats causés par les pollutions de certaines activités humaines, la pression démographique, mettent en danger la ressource en eau pour le siècle qui vient. D’ores et déjà en France se côtoient des territoires qui disposent de réserves suffisantes et d’autres qui souffrent de déficits hydriques importants. Limitrophe du département de l’Hérault, celui de l’Aude est ainsi soumis à un déficit chronique de ressources en eau.
C’est par un service national de l’eau que la mutualisation et la coopération entre les territoires, devenues une nécessité absolue, peuvent être réalisées. Un tel service public national permettrait d’appliquer à l’eau potable la règle verte, celle qui consiste à ne pas prélever dans la nature plus qu’elle ne peut reproduire. Le grand cycle de l’eau doit être suivi avec attention pour que les nappes phréatiques naturelles se renouvellent et que les étiages des rivières se maintiennent, l’équilibre de l’écosystème qui nous fait vivre en dépend.
La ressource en eau doit être économisée. Cela nécessite un investissement massif dans le renouvellement des réseaux pour diminuer au maximum le gaspillage des fuites d’eau, une meilleure utilisation de la ressource en évitant le recours à l’eau naturelle pour des structures comme les golfs, en retraitant pour ce type d’usage celle sortant des stations d’épuration. Cela nécessite de vrais plans d’économie et des investissements pour que la ressource soit préservée et affectée aux besoins humains. C’est nécessaire et possible ; avec la régie des eaux de Montpellier nous avons pu baisser le prix de l’eau de 10 % tout en multipliant par 3 les investissements pour l’entretien des réseaux et la préservation de la ressource. Preuve est faite que la gestion publique est plus économe et plus efficace que la gestion privée !
Est venu le temps de nationaliser l’eau. Il y a quelques mois, pour la première fois un pays de l’union européenne et de la zone euro, la Slovénie, a décidé souverainement – par un vote unanime de son Parlement – de démarchandiser l’eau. Ce pays a décidé d’intégrer à sa Constitution non seulement le droit à l’eau potable et à l’assainissement mais il a également décidé d’interdire la privatisation de l’eau. Le texte stipule que l’eau est devenue un bien public national inaliénable :
« Les ressources en eau sont un bien public géré par l’Etat. Elles sont destinées en premier lieu à assurer l’approvisionnement durable en eau potable de la population, et ne sont à ce titre pas une marchandise« .
Il revient à la France lors des prochaines élections présidentielles de répondre à l’appel de la Slovénie en décidant la même chose. La nationalisation de l’eau potable est au cœur des propositions de Jean-Luc Mélenchon développées dans « l’avenir en commun », programme de la France insoumise. Ne ménageons pas nos efforts pour défendre cette proposition sur tout le territoire de notre République.
René Revol