Dans ce compte-rendu, je reviens sur le mandat que j’exerce depuis 6 mois au sein de l’Agglomération de Montpellier, en tant que conseiller communautaire et Vice-président en charge de la politique de l’eau et des milieux aquatiques. Ce compte-rendu retrace mes actions et choix, explique ma démarche, avec le souci de favoriser la participation citoyenne, de permettre à chacun de se faire sa propre opinion. Exercer sa capacité d’analyse critique passe d’abord par le droit d’accès à l’information.
Un mandat issu de la souveraineté populaire
- Élu à l’Agglo au titre de la ville de Grabels je suis engagé par le mandat que m’a donné la majorité des électrices et électeurs de ma Commune, par mes engagements électoraux très clairs, y compris sur l’intercommunalité. Mes prises de position à l’Agglo sont fidèles à ce mandat et à aucun autre, j’en informe et consulte si nécessaire la majorité municipale.
- La décision d’accepter d’être Vice-président a notamment été prise et portée collectivement par l’ensemble des élus de la majorité municipale.
- J’ai accepté le poste de Vice-président pour remplir la mission de mettre en place la régie publique de l’eau potable, avec les garanties de conserver mon entière liberté politique, prenant au mot l’engagement de faire de la politique autrement.
Je rendrais compte régulièrement de mon action et de mes votes au sein de cette institution.
Depuis mon entrée en fonction le 22 avril 2014 en tant que Vice-président et membre du bureau, mon souci a principalement été de trouver les moyens juridiques d’organiser le retour en régie publique de la gestion de l’eau potable ; rappelons que le Conseil d’agglomération du 25 juillet 2013 avait sous la présidence de JP Moure décidé de renouveler pour 7 ans la privatisation de l’eau et de privatiser l’eau brute (jusque-là gérée en régie publique).
EAU POTABLE : Le retour en Régie
La première action concrète de ce mandat, se traduit par le vote du Conseil d’Agglomération du 7 mai 2014, adoptant à l’unanimité le principe d’une mise en place d’une régie publique de la gestion de l’eau potable. Cette régie publique est programmée pour devenir effective le 1er janvier 2016. Le réaliser en dix huit mois est un défi puisque nous serons la seule collectivité de cette taille à l’avoir fait aussi vite, alors même que le marché de renouvellement de la DSP était déjà lancé. Pour revenir en régie publique de l’eau potable il fallait commencer par assurer la continuité du service de l’eau ; donc obtenir du représentant de l’Etat le droit de signer un avenant d’une année avec le délégataire et négocier avec ce dernier le contenu de cet avenant. Nous avons, élus et services de l’agglomération, travaillé d’arrache-pied pour négocier les avenants des contrats en cours et assurer la continuité du service au mieux des intérêts des usagers et de la collectivité. Cela a été réalisé cet été : avec un prix de l’eau identique nous avons obtenu la réduction des marges de l’entreprise privée afin de dégager un excédent permettant à la fois d’avoir un haut niveau d’investissement dans la lutte contre les fuites et de financer le passage en régie. Ainsi, contrairement aux allégations mensongères, le passage en régie se fait sans qu’il en coûte un centime de plus à l’usager et au contribuable.
C’est seulement le 7 octobre que nous avons enfin reçu l’accord de la Préfecture, accord obligatoire, permettant au conseil d’agglomération de délibérer le 30 octobre pour « déclarer sans suite le marché de Délégation de Service Public au privé de l’eau potable pour motif d’intérêt général ». Ce qui signifie en clair que désormais la marche à la Régie est irréversible ! C’est une grande victoire pour un projet que je défends depuis des années contre vents et marées.
Ce retour en régie s’accompagne d’outil de contrôle citoyen : dès le mois de juin a été mis en effet en place un comité citoyen de suivi du retour en régie publique de l’eau. Ce comité de 25 personnes est composé de quatre collèges : experts et universitaires, représentants syndicaux, représentants d’associations citoyennes et environnementales et élus. Le compte rendu filmé de la première réunion est accessible à tous sur le site de l’Agglomération de Montpellier, en cliquant ici.
Cette première réunion a permis de définir différents ateliers de travail : prix de l’eau, avenir du personnel, mode de gestion, la ressource et sa préservation …. Un premier atelier s’est tenu le 1er octobre sur la question du statut de la future régie. A l’issue de cette réunion la proposition de statut qui a recueilli l’assentiment majoritaire de ce comité est la régie avec autonomie financière et personnalité morale. Elle offre la garantie d’une gestion sociale, écologique et démocratique de la ressource en eau. En effet seul ce statut permet la présence dans le conseil d’administration de représentants d’usagers et de salariés. C’est que je défends car la gestion de l’eau n’est pas que l’affaire d’un petit nombre d’élus.
La prochaine échéance de ce comité de suivi est l’organisation d’une assemblée plénière ce 4 novembre, réunion qui, je le souhaite, suivra l’avis du groupe de travail quant au choix du statut de la future régie. Car dans un pays qui a vu naître les multinationales de l’eau, le retour vers le public est toujours un défi. Et si l’Agglomération de Montpellier n’est pas la première loin de là à s’engager dans cette voie, le chemin de la transition n’est pas simple. Pour preuve cette reprise en gestion publique au nom de l’intérêt général et de la préservation d’un bien commun nécessite d’aller vite pour adopter à présent les futurs statuts de cette régie et recruter son directeur.
Cette nouvelle responsabilité me permet de siéger au Conseil d’Administration du Comité de Bassin Rhône Méditerranéen. Cette agence de l’eau pilote la politique de l’eau dans tout le secteur grand sud-est de la France et j’ai eu l’occasion de m’élever contre la ponction financière du gouvernement sur le budget de l’eau diminué d’un quart pour renflouer les caisses de l’Etat. Cela est d’autant plus scandaleux que le budget de l’agence de l’eau provient d’une taxe dédiée payée sur toutes les factures d’eau et qui est ainsi détournée de son objet.
J’aurais l’occasion dans de futurs comptes-rendus de critiquer et d’alerter sur un autre sujet d’importance, celui de la potabilisation de l’eau polluée du Rhône au lieu de compter sur nos ressources souterraines de qualité et de proximité.
La question de l’assainissement
L’autre champ de compétence de ma délégation à l’Agglomération est le volet « assainissement », c’est-à-dire tout le réseau d’eaux usées et les stations d’épuration. Les enjeux en termes d’environnement, de préservation du milieu naturel et de santé publique sont considérables. Comme je l’ai déjà dit publiquement, je suis favorable au retour de la gestion de l’assainissement en régie publique. Reste que certains pensent encore en regard du poids économique des délégataires privés que la puissance publique ne saurait pas faire. Je garde en mémoire le vœu déposé au conseil municipal de Montpellier le 6 mai 2013, demandant le retour en régie publique de l’eau et de l’assainissement, qui avait été voté par les seuls élus EELV et Front de Gauche, alors que la droite et la majorité PS d’alors avaient voté contre… et que Philippe Saurel s’était abstenu. Face aux détracteurs, aux septiques, voire aux hésitants il nous faut réussir le retour en régie publique de l’eau potable pour convaincre que le retour en régie publique de l’assainissement est nécessaire.
Le choix est donc de mettre en place en une quinzaine de mois une régie publique de la gestion de l’eau potable et de préparer son extension à l’assainissement, ce qui est un des aspects essentiel des nouveaux contrats, négociés pour un temps plus courts avec une clause de retrait possible au bout de trois ans pour un des trois contrats. Sans rentrer dans les détails, la négociation a duré tout l’été et a débouché sur un choix positif pour l’intérêt général. Au final deux sociétés ont été retenues pour le traitement des eaux usées : Véolia et Alteau. La négociation de ces nouveaux contrats de DSP pour 7 ans a mobilisé 48h d’auditions dans le cadre de la loi et un nombre incalculable d’heures de travail. Contrairement aux critiques (souvent instrumentalisées par les groupes industriels qui ont perdu l’appel d’offre) nous avons obtenu des avancés sur les différents lots (Maera, réseau Maera, secteur Est Ouest), en sachant que nos marges de manœuvres étaient plus que limitées car le marché avait été lancé par l’ancienne majorité sous l’égide de Jean-Pierre Moure :
- Une baisse significative de plus de 20 % du prix payé aux délégataires donc une baisse de leurs marges
- Un meilleur service tant vis-à-vis des usagers que dans l’entretien du réseau avec un taux élevé d’investissement
- Un procédé nouveau pour tenter de lutter contre les odeurs de l’usine Maera
- Enfin la collectivité aura le contrôle de tout le système d’information ce qui lui permettra d’en avoir la maîtrise technique pour préparer un retour en régie.
Reste qu’il faudra rester vigilant, c’est d’ailleurs pour cette raison que je réitère mon exigence que l’association Eau secours 34 intègre la commission Consultative des Services Publics (CCSPL) car c’est la commission qui a la charge de contrôler les DSP.
Enfin un des derniers dossiers dont j’ai la responsabilité est la lutte contre les inondations. Aujourd’hui on prend de plus en plus en compte les préoccupations sociales, environnementales et démocratiques de la gestion de la ressource de l’eau. Mais il convient aussi d’intégrer pleinement le changement climatique et ses conséquences sur notre territoire. Les experts alertent depuis des années sur l’augmentation probable des évènements extrêmes météorologiques, et l’impact de l’intensité des précipitations avec l’augmentation des risques d’inondations brutales…
Les épisodes du 29 septembre et 6 octobre –qui comme vous le savez ont durement frappé ma Commune y compris mon propre domicile- donnent une acuité particulière à ce dossier. Mon action a surtout consisté à monter un dossier d’actions et de travaux d’un montant de 16 millions d’Euros qui vont se réaliser dans ce qu’on appelle le PAPI (plan d’actions et de préventions des inondations). Le premier volet pour notre territoire sur la période 2007 2014 s’est concentré sur le Lez et on a pu en voir les effets bénéfiques. Le dossier 2015/2020 se concentrera sur la Mosson et on a malheureusement vu la nécessité de cette action. La lutte contre les inondations ne se limite pas à des ouvrages de protection : il faut aussi d’une part améliorer les dispositifs de sécurité civile et d’autre part changer la nature et le rythme de notre urbanisation. J’aurai l’occasion de revenir sur ce dossier.
Pour un bilan de mon expérience d’action au cœur de la catastrophe que nous avons vécu à Grabels je vous renvoie à ma note : « leçons de choses ».
Politique Générale de l’Agglomération de Montpellier :
Dans ces six mois de mandature j’ai pu exprimer mon accord sur des positions affirmées par l’agglomération mais j’ai pu aussi à certains moments manifester mes désaccords comme sur le cas de la métropole et de la gare TGV.
Le 2ème conseil extraordinaire concernait les transports et plus particulièrement la baisse de la tarification des titres de transports. En effet, le carnet de 10 voyages est passé à 10 euros et l’abonnement mensuel pour les jeunes de moins de 26 ans a baissé de 20%. Certes cette baisse n’est pas suffisante mais elle est un premier levier dans une nouvelle politique en matière de transport. En 2015, va être élaboré le nouveau schéma de mobilité, puisqu’en dehors du Tram, les villes périphériques sont très mal desservies en matière de transport en commun. Les trajets des bus sont parfois incohérents et leur fréquence est insuffisante.
Il faut donc repenser entièrement le schéma de mobilité afin de permettre aux citoyens de l’Agglomération un véritable service public des transports en commun. Notons également que l’abandon de la ligne de tram n°5, permet de préserver le Parc Mont Calm, véritable poumon vert de la Commune de Montpellier.
Ensuite, des mesures ont été prises comme la baisse très significative du budget communication ainsi que l’abandon de la marque « Montpellier Unlimited ». L’autre amélioration est la nouvelle méthode d’attribution des Projets d’Intérêts Communautaires (PIC). Avant ces PIC étaient attribuées à « la tête du client », désormais l’enveloppe est la même pour toutes les communes Montpellier plus riche ne recevant rien. La ville-centre n’aura plus de PIC. Et à partir de 2015 les PIC seront abandonnés pour un système de financement des projets plus mutualisés et sur des critères objectifs.
Enfin, des projets ont été lancé qu’il faudrait bien évidemment suivre comme la relance de la politique agricole en soutenant le développement des circuits courts et le projet de ceinture verte autour de la ville centre. Ainsi que la politique culturelle qui envisage de mieux insérer la culture dans tout le territoire, mettant fin à des pratiques élitistes avec pour seul centre névralgique Montpellier.
Durant ces 6 mois, j’ai pu exprimer mon désaccord sur deux sujets primordiaux débattus en Conseil d’Agglomération.
Métropole
j’ai pu rencontrer de nombreux élus et m’exprimer contre cette réforme territoriale qui éloigne encore plus les citoyens des lieux de décisions en concentrant tous les pouvoirs dans des mégas-régions et quelques grosses métropoles comme celle de Montpellier. Pour le cas de Montpellier, le passage en Métropole n’était pas automatique comme pour les 13 autres ; elle restait la seule qui avait à en faire ou non le choix. Choix qui fut largement discuté en Conférence des Maires et en Bureau de l’Agglo ; j’ai exprimé publiquement mon désaccord pour le passage en métropole. Certes celui-ci est accompagné d’un pacte de confiance voulu par le Président, donnant des garanties internes aux Maires des différentes communes (en particulière pour la compétence urbanisme). Mais cette charte n’est pas une garantie à long terme.
En conséquence j’ai voté contre avec mon Conseil Municipal ce qui était le seul vote statuant sur ce sujet. Le 24 octobre j’ai constaté que la majorité des communes a accepté le passage en métropole m’abstenant sur une résolution qui ne faisait que prendre acte du vote des communes pour marquer le maintien de mon désaccord.
Gare Sud de France
Prévue dans le secteur dit de la Mogère, cette gare cumule trois inconvénients majeurs. Celui de détruire d’importants espaces agricoles de la ceinture verte de Montpellier et d’ouvrir ce secteur aux appétits des promoteurs immobiliers sur quelques 350 hectares, faisant fi des graves conséquences de l’imperméabilisation déjà fortement engagée dans cette zone avec le doublement de l’A9. Cette imperméabilisation, et c’est une seconde raison rédhibitoire, ferait encourir à cette gare le risque réel de devenir sous-marine. Le Plan de prévention des risques de Montpellier de 2003 situait déjà son emplacement en zone inondable, classée rouge ! Vu l’urbanisation récente et celle qu’appellerait la construction de cette gare, ce projet est devenu proprement insoutenable. D’autant que les violents épisodes méditerranéens récents sont appelés à se renouveler, ainsi que le prévoyait clairement le GIEC dans un de ses premiers rapports. Enfin ce projet peine à être justifié d’un point de vue strictement fonctionnel, cumulant plusieurs désavantages. Celui du coût et de sa construction (140M€) et du prolongement de la ligne 1 du Tram qui doit franchir l’A9 (40M€) ; celui de l’éloignement de la gare pour la grande majorité des voyageurs, avec aussi l’absence d’interconnexions avec les trains régionaux ; celui d’une rentabilité très inférieure aux prévisions surévaluées de la SNCF et du RFF.
Il faut enfin dire clairement qu’un PPP (Partenariat Public Privé) qui, comme le démontre de nombreux exemples, est toujours coûteux et fait la part belle à de grandes firmes, Vinci dans la cas présent. La firme emprunte à des taux plus élevés que la puissance publique et prend très généralement des marges importantes. Cela est bien sûr payé par les taxes et impôts. Ce PPE n’étant pas encore signé (il ne peut l’être qu’après le rapport du commissaire enquêteur), il est encore temps de s’en retirer sans frais.
La gare rénovée de Montpellier permet l’intermodalité, pas la gare excentrée qui aggraverait les conditions de transport. Elle est suffisante pour la décennie, nous avons le temps de penser à un projet ailleurs qui éviterait les inconvénients de celui présenté. Estimant donc que cette seconde gare de la Mogère serait une erreur à ces différents pour toutes ces raisons, qu’elle imposerait des contraintes financières lourdes à l’Agglomération de Montpellier, j’ai écrit en ce sens au Commissaire enquêteur.
Pour conclure je voudrai insister sur la nécessité d’une « nouvelle gouvernance plus citoyenne » thème cher à Philippe Saurel qui nous annonce des initiatives à ce sujet d’ici la fin de l’année. Certes je constate une plus grande liberté pour les élus de l’agglo dans les débats tant au bureau (tous les lundis alors que dans la mandature précédente le bureau était une chambre d’enregistrement réunie une fois tous les deux mois) qu’en commission et au conseil. Par exemple j’ai pu défendre une position contraire à celle défendu par P. Saurel sur la métropole dans une réunion publique en étant à la même tribune : cela aurait été inimaginable avant.
Mais il faut aller plus loin dans la citoyenneté active : je ne manquerai pas ce rendez-vous en faisant des propositions concrètes dans ce débat annoncé sur une nouvelle démocratie communale.
A Grabels le 4 novembre 2014
René Revol,
Maire de Grabels
Vice-président de l’Agglomération de Montpellier
en charge de la politique de l’eau et des milieux aquatiques.
Pour télécharger le compte-rendu de mandat, cliquez ici.